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Nouvelles du Tibet
Informations parues dans Tibet Info du 1er au 31 mars 2002
10. C. Patten réclame un dialogue (30/03) 9. J Fischer très ferme devant l'ONU (21/03) 8. Drapeaux tibétains sur la Tour Eiffel (16/03) 7. Colonisation à Dulan. Bis. (15/03) 6. Le Dalaï Lama n'est pas chinois ! (14/03) 5. Message du Dalaï Lama 10 mars 2002 (10/03) 4. Dialogue ? Non, merci ! (10/03) 3. Conseil de dialogue... (09/03) 2. Rapport US sur les droits de l'homme (06/03) 1. Interview de Samdhong Rinpoché (04/03)
C. Patten réclame un dialogueLe commissaire européen aux affaires extérieures, Chris Patten, a invité le 29 mars la Chine à entamer un dialogue avec le chef spirituel en exil des Tibétains, le Dalaï Lama. Lors d'un forum avec des étudiants de l'université de Fudan à Shanghaï, M. Patten a dit que l'Union européenne souhaitait l'ouverture d'un dialogue pour promouvoir la réconciliation et qui "ne serait pas mauvais pour l'image de la Chine sur un plan international". L'UE ne conteste pas que le Tibet soit une province chinoise, mais souhaite que les traditions linguistiques et culturelles du Tibet soient préservées, a-t-il ajouté. La Chine accuse le chef spirituel tibétain de ne pas avoir renoncé à ses vues indépendantistes et de ne pas "être qualifié" pour représenter le peuple tibétain. Pékin avait rejeté au début du mois un appel au dialogue lancé par Paula Dobriansky, coordinateur pour le Tibet au département d'Etat (ministère des Affaires étrangères) américain, estimant que le Tibet constituait une "affaire intérieure chinoise". (Voir "Conseil de dialogue) Source : AFP 29 mars 02Ajouté le samedi 30 mars 2002 par Tibet info. Haut de la page
J Fischer très ferme devant l'ONUJoschka Fischer, le ministre allemand des Affaires étrangères, a dénoncé le 20 mars avec fermeté les violations des droits de l'Homme, observant devant la Commission des droits de l'Homme de l'ONU que "sous aucun prétexte, les droits de l'Homme fondamentaux ne doivent être édulcorés sous le prétexte de la lutte contre le terrorisme". Concernant la Chine, il a évoqué les persécutions des différents cultes religieux et du Falun Gong et "l'oppression des minorités ethniques", demandant à Pékin "d'accorder aux Tibétains et aux Ouïgours des droits substantiels à l'autonomie". Source : AFP 20 mars 02Ajouté le jeudi 21 mars 2002 par Tibet info. Haut de la page
Drapeaux tibétains sur la Tour Eiffel 42 alpinistes militants de la cause tibétaine ont escaladé la Tour Eiffel à l'aube du 10 mars, où ils ont déployé une banderole, avant d'en redescendre par les escaliers accompagnés par des agents de la tour. Les militants ont escaladé la Tour Eiffel vers 5h par le pilier de l'Alma, déjouant les différents systèmes de sécurité (caméras, chiens...). Une quinzaine d'alpinistes, confirmés dans l'escalade, se sont accrochés avec des sangles aux poutres entre les différents étages, et ont déployé des drapeaux tibétains et des banderoles ("Tibet libre", "paix au Tibet") tandis que les autres étaient répartis dans les structures à l'intérieur de la tour. Ils sont redescendus de leur propre chef après des contacts établis avec la police, par les escaliers, vers 07h40, accompagnés par des agents de la Tour Eiffel. Aucun dégât n'ayant été causé à la Tour, et les officiels n'ayant pas porté plainte, les manifestants ont été immédiatement relâchés par la police. Source : contact direct avec les participants, 10 mars 02.
Photo : remerciements à Lions des Neiges Mont Blanc dont voici le communiqué : "Durant deux heures, les manifestants pacifistes poseront des banderolles "Tibet libre", "Paix au Tibet", des drapeaux à prières et des drapeaux du Tibet sur les quatre faces et les trois étages de l'édifice. A 8 heures, à la demande des autorités, les militants regagnent dans le calme le plancher des vaches, laissant à la tour ses parures tibétaines. La réussite totale de cette opération pacifiste à été rendue possible par le fort engagement des grimpeurs présents et par l'attitude des forces de l'ordre. La forte couverture presse (TF1, F2, F3, C+ ainsi que la presse écrite nationale et régionale) nous a permis de donner un nouvel écho à la cause du peuple tibétain." Plus de photos sur le site de l'association Lions des Neiges Mont Blanc
NB Pour quelque mystérieuse raison, cet article aurait dû être publié le 10 mars au soir, et il n'est pas passé du 3615 Tibet Info au web. Mille excuses...Ajouté le samedi 16 mars 2002 par Tibet info. Haut de la page
Colonisation à Dulan. Bis.Des députés chinois ont appelé le 13 mars la Banque mondiale à reconsidérer le financement d'un projet gouvernemental de réduction de la pauvreté sur le plateau tibétain impliquant l'arrivée de plus de 20 000 paysans chinois dans une région traditionnellement peuplée de Tibétains et de Mongols. (Voir informations dans les nouvelles de mai et juin 1999) "Nous regrettons toujours que la Banque mondiale ait décidé d'annuler son projet de financer un projet de lutte anti-pauvreté au Qinghai il y a deux ans", a déclaré Gao Yonghong, un ancien chef de l'exécutif de la région de Haixi, dans la province du Qinghai où doit avoir le lieu le déplacement de population. La Banque mondiale avait initialement prévu de financer à hauteur de 40 millions de dollars un projet de déplacement de quelque 58 000 habitants, dont la moitié sont des Hans (chinois) ou des Huis (musulmans chinois), mais la banque avait fait machine arrière devant la levée de boucliers d'associations de défense des Tibétains, qui avaient accusé la banque de contribuer à la destruction de la culture tibétaine. M. Gao, qui appartient à l'ethnie mongole, selon l'agence Chine nouvelle qui le cite, a expliqué que le projet vise à élever le niveau de vie des paysans vivant dans des régions peu hospitalières en les relogant dans des zones plus favorables à l'agriculture. Il a précisé qu'il n'y avait pas de "camp de réforme par le travail" dans la zone prévue pour le relogement des paysans. Le Qinghai est tristement célèbre pour abriter nombre de ces camps, qui constituent l'équivalent du goulag pour la Chine. Le gouvernement chinois a décidé au mois de janvier de reprendre le projet et prévoit de reloger plus de 20 000 paysans pour un montant de 660 millions de yuans (80 millions de dollars). Source : AFP 13 mars 02Ajouté le vendredi 15 mars 2002 par Tibet info. Haut de la page
Le Dalaï Lama n'est pas chinois !Pékin a renouvelé le 11 mars ses attaques contre le Dalaï Lama, accusant le chef spirituel tibétain de ne pas avoir renoncé à ses vues indépendantistes et de ne pas "être qualifié" pour représenter le peuple tibétain. Dans une interview au quotidien de langue anglaise China Daily, Legqog, le président de la région autonome du Tibet, a vivement pris à partie l'appel de Washington à dialoguer avec le Dalaï Lama lancé la semaine dernière, estimant que celui-ci n'avait pas de raisons d'être. "Le Dalaï Lama a perdu sa popularité au Tibet et est devenu une marionnette obéissante manipulée par les forces anti-chinoises hors de Chine", a déclaré Legqog, avant de souligner qu'il n'est "pas qualifié pour représenter le peuple chinois" (sic !). La nouvelle salve contre le Dalaï Lama fait suite à des propos tenus par Paula Dobriansky, la coordinatrice pour le Tibet au département d'Etat américain, qui a averti la semaine dernière que la résistance tibétaine risquait de s'intensifier, voire déboucher sur un soulèvement si Pékin continuait à refuser le dialogue avec le Dalaï Lama. Pékin a dès le 9 mars rejeté l'appel au dialogue, estimant que le Tibet constitue une "affaire intérieure chinoise". Dans sa tirade contre le Dalaï Lama, Legqog, qui est un Tibétain de longue date au service du gouvernement chinois, a repris tous les arguments traditionnels du discours officiel chinois, accusant notamment le chef spirituel tibétain de "manquer de sincérité", ce qui "a conduit à l'absence de progrès dans les contacts et les discussions". "Le Dalaï Lama n'a ni abandonné ses activités séparatistes, ni abandonné son point de vue indépendantiste", a encore dit Legqog, avant d'ajouter que "la situation des droits de l'homme au Tibet n'avait jamais été meilleure depuis le départ en exil du chef spirituel tibétain en 1959". Le président de la "Région autonome" du Tibet a par ailleurs invité les touristes et les hommes d'affaires étrangers à venir au Tibet "pour découvrir la vérité ou pour y investir" à condition de ne pas s'ingérer dans "les affaires intérieures chinoises" (NdR dépenser, mais ne pas regarder de trop près, et surtout ne pas poser de questions !) Les journalistes étrangers sont pour leur part toujours strictement interdits au Tibet, où ils ne peuvent se rendre qu'en voyage organisé par les autorités. Montrer une photo du Dalaï Lama, par exemple, ou sortir du Tibet une liste de prisonniers politiques, sont passibles de prison... Source : AFP 11 mars 02Ajouté le jeudi 14 mars 2002 par Tibet info. Haut de la page
Message du Dalaï Lama 10 mars 2002
43ème anniversaire du soulèvement du peuple tibétain Message de Sa Sainteté le Dalaï-Lama
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Dialogue ? Non, merci !La Chine a rejeté le 9 mars l'appel au dialogue avec le Dalai Lama lancé par la coordinatrice pour le Tibet au département d'Etat américain, et répété que la question tibétaine était une affaire intérieure chinoise. Le Dalai Lama "n'est pas une personnalité purement religieuse, mais le plus grand seigneur pratiquant le servage dans l'ancienne société tibétaine. Depuis longtemps, il cherche à diviser la Chine depuis l'étranger", a déclaré le porte-parole du ministère des Affaires étrangères. "Si le Dalai Lama veut sincèrement dialoguer avec le gouvernement chinois, il doit cesser de promouvoir l'indépendance du Tibet, cesser ses activités séparatistes, déclarer publiquement que le Tibet est une partie inaliénable de la Chine et reconnaître que Taiwan est une province chinoise", poursuit Kong Quan dans un communiqué. "Sans tenir compte des faits, un fonctionnaire américain a critiqué sans raison le gouvernement chinois, manifestement avec des arrière-pensées. Cela ne peut que continuer à provoquer mépris et opposition de la part du peuple chinois", a encore dit le porte-parole. (Cf article suivant) Source : AFP 9 mars 02Ajouté le dimanche 10 mars 2002 par Tibet info. Haut de la page
Conseil de dialogue..."La Chine risque de développer une résistance au Tibet et de ternir sa réputation dans le monde si elle refuse d'engager le dialogue avec son leader spirituel, le Dalaï Lama", a estimé le 7 mars devant le Congrès US Paula Dobriansky, coordinateur pour le Tibet au département d'Etat américain. Paula Dobriansky a déclaré lors d'une audition devant la Chambre des représentants que "si le gouvernement chinois ne discutait pas avec le Dalaï Lama, qui cherche avec force un dialogue et une solution mutuelle, la résistance tibétaine pourrait s'intensifier et l'éventualité d'un soulèvement politique pourrait augmenter". "Le Dalaï Lama peut être un atout dans la difficile mise en place d'une stabilité régionale et nationale", a estimé Mme Dobriansky. En effet, "il représente indiscutablement l'opinion de la plupart des Tibétains et son autorité morale dépasse les intérêts tibétains". L'acteur Richard Gere a déclaré devant la même commission que le "Dalaï Lama était la solution au problème". "Il est extrêmement important (...) qu'il reçoive le soutien des démocraties et des organisations de défense des droits de l'Homme dans le monde entier pour faire tout ce qu'il peut pour mettre en place une solution et une paix durable sur le long terme". Source : AFP 7 mars 02Ajouté le samedi 9 mars 2002 par Tibet info. Haut de la page
Rapport US sur les droits de l'hommeLe département d'Etat américain vient de publier son rapport annuel sur les droits de l'homme dans le monde (hors USA). Selon ce rapport, les violations des droits de l'Homme ont été "nombreuses et graves" en Chine en 2001. "Les autorités répriment toujours avec célérité toute personne ou groupe, qu'il soit religieux, politique ou social, perçu comme une menace pour le pouvoir ou la stabilité nationale". "Dans beaucoup de cas, le système judiciaire refuse aux accusés des garanties juridiques minimales", poursuit le texte qui souligne également que le gouvernement chinois "ne respecte pas la vie privée des citoyens" notamment en "restreignant le nombre d'enfants qu'une famille est en droit d'avoir". Le rapport souligne que la liberté d'expression, d'association et de culte est "sévèrement restreinte" et que de "graves violations de droits de l'Homme persistent au Tibet et au Xinjiang, où la sécurité a été renforcée". De plus "le gouvernement ne permet pas à des organisations non gouvernementales indépendantes chinoises de surveiller le respect des droits de l'Homme", rappelle le texte. Le département d'Etat regrette aussi l'absence de statistiques officielles sur le nombre de condamnations ou de prisonniers. "A cause du contrôle étroit exercé par le gouvernement sur l'information, il n'est pas possible de déterminer précisément le nombre de personnes détenues ou ayant été arrêtées de façon arbitraire". La campagne "frapper fort" qui s'est traduite par plus de 2 000 exécutions en six mois, a aussi ciblé "quelques dissidents, séparatistes et membres des églises clandestines", selon le département d'Etat. "Selon des informations de presse internationale, plus de 200 000 personnes sont incarcérées dans des camps de rééducation par le travail sans que leurs dossiers puissent être réexaminés". "Le travail des enfants existe dans les régions rurales" et "le trafic d'êtres humains est un grave problème", selon le document qui s'intéresse aussi au droit du travail, et souligne que "la Chine n'a pas ratifié les conventions sur le droit d'association, le droit à la négociation collective et l'interdiction du travail obligatoire". Le ministère chinois des Affaires étrangères a rejeté ce rapport, arguant qu'il constitue une "ingérence dans les affaires intérieures de la Chine sous prétexte de droits de l'Homme". Source : AFP 5 mars 02
Le texte original de ce rapport peut être trouvé sur le site du gouvernement américain.Ajouté le mercredi 6 mars 2002 par Tibet info. Haut de la page
Interview de Samdhong RinpochéA l'occasion du 10 mars, commémoration du soulèvement national tibétain en 1959, Tibet Info vous recommande la lecture de cette interview de Samdhong Rinpoche, le Premier ministre du gouvernement tibétain en exil, répondant aux questions du rédacteur en chef du site Internet www.rediff.com, publié dans La Lettre du Tibet n. 61 (fév.). Cette interview, diffusée alors que Sa Sainteté le Dalaï Lama était brièvement hospitalisé dans un hôpital de Mumbai, donne un éclairage intéressant sur le souci de démocratisation et de continuité qui anime le chef de l'Etat tibétain et ceux qui l'entourent.
Samdhong Rinpoche, voulez-vous nous dire quelques mots sur vous même ? Je suis né dans un village isolé du sud-est du Tibet. Le village était très pauvre et j'appartenais à une famille de paysans pauvres. Je suis entré au monastère à quatre ans et ma vie s'en est trouvée améliorée. A cinq ans, je fus reconnu comme réincarnation du quatrième Samdhong Rinpoche et l'on me donna tous les moyens d'une bonne vie et j'eus la chance de recevoir une bonne éducation. A 12 ans, j'ai quitté ma région natale pour aller suivre des études au Tibet central. Mais lorsque j'eus 20 ans, j'ai dû m'enfuir du Tibet à cause de la répression chinoise et j'ai trouvé refuge en Inde. Après cela j'ai mené une vie de moine libre pendant environ une année. En Juillet 1960, je fus appelé à Dharamsala par Sa Sainteté le Dalaï Lama, et depuis j'ai travaillé pour les Tibétains en exil à des postes variés. Je suis devenu professeur à l'Institut Central des Hautes Etudes Tibétaines de Bénarès (Varanassi) en 1971 et je le suis resté jusqu'en 2001.
Avant d'être reconnu comme Tulkou, vous souvenez-vous de ce qu'était votre vie ? Je ne me souviens pas de grand chose. Mes parents travaillaient aux champs et m'emmenaient sur leur dos. Ils me laissaient au pied d'un arbre quand ils étaient au travail et me donnaient du lait de temps en temps. La nourriture ne manquait pas, mais les vêtements et les jouets étaient difficiles à se procurer…
Vous êtes le premier Président du Conseil (Kashag) élu au suffrage universel. Quel était le système auparavant et quelle idée soutenait cette élection ? Je ne peux pas vous dire exactement ce que Sa Sainteté le Dalaï Lama avait en tête, mais il n'était pas satisfait du système qui l'obligeait à nommer les candidats ministres. Le parlement en exil devait choisir parmi eux et n'était pas libre de les choisir à l'extérieur de cette liste. Sa Sainteté trouvait que cela manquait de respect pour l'opinion; en effet les parlementaires élus tenaient tout leur pouvoir du peuple alors que ce n'était pas le cas de l'Exécutif. Il voulait donc élargir la légitimité démocratique de ce dernier et l'encourager à décider d'une politique et à mener à bien des projets. Dans le même temps si le Premier ministre disposait du pouvoir de choisir lui même son équipe, il en serait plus sûr de lui et déterminé. C'est en fonction de ces considérations que sa Sainteté a décidé des changements intervenus en mars 2001. A cette époque, j'avais décidé de me retirer de la vie publique. Le nouveau système a été présenté au Parlement juste à la fin de ma présidence de ce dernier. Suivant les conseils de Sa Sainteté, le Parlement amenda la constitution pour pouvoir faire élire le Premier ministre au suffrage universel. Et, par chance ou par malchance, je fus choisi à ce poste.
Ainsi, une fois élu, vous pouvez composer votre équipe ? Oui, mais je dois la faire approuver par le Parlement. Si quelqu'un présente des objections, il y a un vote. Si le candidat obtient plus de 50%, il ou elle peut demeurer, sinon je dois choisir un nouveau candidat. C'est un peu comme dans le système américain.
Vous avez maintenant un Parlement, un gouvernement et un système politique qui se tient... mais que peut-il faire pour tous ceux qui sont au Tibet ? Quelle influence peut-il avoir sur le peuple de l'intérieur ? Le gouvernement tibétain en exil, en tant que tel, a peu d'occasions et de moyens de travailler au Tibet ou d'y mener une action. Mais les Tibétains au Tibet croient profondément que le gouvernement en exil en Inde, sous l'autorité de Sa Sainteté, est leur gouvernement légitime, tandis que le gouvernement au Tibet, contrôlé par la Chine est illégal et illégitime. Ainsi lorsque des réformes et des améliorations se produisent au sein du gouvernement en exil, cela les encourage et les inspire grandement. Ils pensent toujours que lorsque le pays sera libre ou autonome, ce gouvernement ou le système mis en place ici sera implanté au Tibet. Il aura, d'ici là acquis l'expérience et l'expertise pour aller de l'avant dans le processus démocratique. Il s'ensuit que les gens qui vivent au Tibet sont parfois plus concernés par tout cela que ceux qui vivent à l'extérieur. Les gens qui sont à l'extérieur ne se sentent pas très concernés par l'administration de Dharamsala parce qu'ils vivent dans des pays libres, mais les gens qui sont au Tibet gardent un oeil attentif et un haut niveau de conscience de ce qui se passe ici. Pendant les élections, j'ai tenté de retirer ma candidature, mais j'ai reçu tant de messages émouvants, venant du Tibet et me demandant de n'en rien faire que sous leur influence, j'ai pris la décision de continuer et d'accepter cette élection. C'étaient des messages plein d'émotion, pas des votes, car, bien sûr ils ne pouvaient pas réellement voter.
Ce qui veut dire que seuls les Tibé-tains hors du Tibet ont pu voter dans cette élection. Combien sont ils ? Environ 52 % des électeurs inscrits ont confirmé leurs votes sur une soixantaine de mille.
La nervosité augmente chez les jeunes Tibétains à propos du choix d'une stratégie non violente. Comment pourriez-vous le justifier à leurs yeux ? La non violence est la seule option pour les Tibétains. Il faut considérer cela sous deux angles. D'abord, Sa Sainteté et ceux qui le suivent voient là une position de foi, ou une attitude moralement justifiable. La non violence est le seul moyen d'obtenir un résultat durable, et même si la violence peut être d'une certaine efficacité, cela ne durera pas. D'autre part, si vous voyez les choses en termes de stratégie et non plus de foi, là aussi la non violence est plus efficace, moins coûteuse et provoque moins d'effets contraires. Même si vous croyez en la violence, et que vous prenez en considération le potentiel des chinois face à une poignée de Tibétains, elle est pratiquement impossible. C'est pourquoi ce chemin de la non violence nous a donné beaucoup de satisfactions et nous a permis d'accomplir plus encore que nous n'espérions.
Mais quelles réalisations tangibles pouvez-vous afficher face aux jeunes ? Si vous regardez l'histoire de tous les pays colonisés dans le monde, aucun n'a obtenu la liberté avant quarante, cinquante ans, parfois un siècle ou plus. L'Inde, par exemple, a dû se battre pendant plus de trois cents ans pour recouvrer son indépendance. Bien que cela puisse sembler long pour un individu, 50 ans ou 42 ans ne sont qu'un petit laps de temps dans l'histoire des nations. Mais dans ce petit laps de temps, nous avons porté la question du Tibet sur la liste des priorités, au plus haut niveau de la communauté internationale comme dans des actions quotidiennes. Il n'y a pratiquement pas de pays où des groupes de soutien n'aient vu le jour et ne travaillent activement, en Amérique du Nord et du Sud, en Afrique, en Europe. Ils travaillent bénévolement, avec leurs moyens propres. Cela n'a été possible que dans la mesure où les Tibétains demeuraient non violents. Autrement, il aurait pu y avoir une certaine catégorie de gens qui nous auraient aidés avec des armes et des munitions, entraînant nos jeunes à la guerre de guérilla, mais cela ne nous aurait pas apporté l'immense soutien et la sympathie dont nous jouissons dans le monde.
Mais tandis que cette lutte se poursuit, on dit que les Chinois sont en train de bouleverser la situation démographique au Tibet et que les Tibétains pourraient devenir bientôt minoritaires dans leur propre pays. Ils sont déjà en minorité. La Chine fait tout pour submerger les Tibétains au Tibet, mais ces transferts forcés de population ne sont pas solides. S'il y avait un changement de scénario politique, beaucoup de Chinois voudraient rentrer chez eux. Ils ne souhaitent pas vivre au Tibet. Ils ont des problèmes avec le climat tibétain, donc en cas de changement, ils ne seraient pas à leur aise, socialement et émotionnellement. Et puis même aujourd'hui, les Chinois n'ont réellement changé l'équilibre démographique que dans les zones urbaines, pas à la campagne. Ils n'ont pas réussi à bouleverser les choses dans les sociétés nomades.
En principe, le Dalaï lama n'est pas autorisé à avoir une activité politique sur le territoire indien. Ces élections ne constituent-elles pas une activité politique ? En 1959, le gouvernement indien a informé Sa Sainteté qu'aucune activité dirigée contre la Chine ne pourrait être menée en Inde. Nous nous en sommes tenus très scrupuleusement à cette règle et n'avons rien fait de contraire au cours des 42 ans écoulés... Je ne pense pas que les Chinois puissent dire quoi que ce soit à propos de ces élections. S'ils les reconnaissaient comme valables, ils pourraient prétendre qu'il s'agit d'une activité politique. Mais comme ils ne reconnaissent même pas l'existence de notre gouvernement en exil, quoique nous fassions, cela n'a pas d'importance. S'ils disent qu'il s'agit de l'action d'un gouvernement en exil, alors ils reconnaissent notre existence indirectement. Il est arrivé quelque chose dans ce genre il y a quelque temps. Les Chinois se sont plaints du déploiement du drapeau national tibétain. Alors quelqu'un leur a demandé : "vous reconnaissez ce drapeau comme un drapeau national ?" Ils ont répondu "non", alors on leur a rétorqué "s'il s'agit juste d'un morceau de tissu, quelle raison avez-vous de vous y opposer ?"
Quels sont les papiers d'identité dont disposent les Tibétains réfugiés en Inde, notamment lorsqu'ils veulent voyager à l'étranger ? Nous avons un certificat d'identité fourni par le gouvernement indien selon la législation sur les personnes privées d'état. Selon cette législation, le pays d'accueil a le droit de fournir de tels certificats et la plupart de nos concitoyens en ont un. Nous appelons cela une "carte jaune". C'est un peu comme les autres passeports sauf qu'à la rubrique nationalité il est écrit "apatride, réfugié en Inde". On peut, sur ce document, obtenir des visas pour différents pays. Nous pouvons également obtenir la mention NORI (no objection to return to India), mais si nous voyageons à l'étranger, nous perdons notre carte de résident, aussi devons-nous demander un visa pour l'Inde là ou nous nous trouvons. Normalement c'est assez simple et nous l'obtenons immédiatement dans les pays d'Europe.
Vous n'avez donc pas la nationalité indienne ? Non, mais nous avons le droit de devenir citoyens indiens, car nous résidons ici depuis si longtemps.
Est-ce que certains en ont décidé ainsi ? Peu, ceux qui occupent des emplois dans l'administration indienne, sinon ce n'est pas nécessaire.
Prendre la nationalité d'un autre pays, est-ce risquer de perdre sa motivation pour la cause du Tibet ? Pas nécessairement. Nous avons inclus une clause dans notre constitution qui stipule que ceux qui ont ressenti le besoin de devenir citoyens d'une autre nation, mais gardent leur foi dans la cause tibétaine, peuvent conserver leur nationalité tibétaine s'ils continuent à payer l'impôt volontaire au gouvernement tibétain en exil. Dans les pays occidentaux il s'élève à environ $80 par an. En Inde, au Bhoutan, au Népal c'est environ 80 Roupies par an. Ceux qui paient ont un livret vert; tant que vous l'avez, vous gardez votre nationalité tibétaine. Si vous ne l'avez pas, vous ne serez pas vraiment considéré comme Tibétain. Ce système a débuté en 1971 et plus de 90% des réfugiés ont cette carte. Le nombre des électeurs inscrits est inférieur, mais pour s'inscrire, il faut commencer par avoir la carte.
Et où va l'argent ? A Dharamsala; c'est la base de notre budget annuel
Et en ce qui concerne les autres ressources, donations, offrandes ? Tout est versé au fond d'épargne du gouvernement tibétain en exil. Nous ne pouvons dépenser que ce qui rentre dans ce fonds et le budget doit être approuvé par le parlement en exil.
A part en Inde, dans quelles régions du monde le mouvement est-il puissant en ce moment ? Au niveau gouvernemental et administratif, les Etats-Unis sont en tête. Le Congrès américain a adopté plusieurs résolutions ordonnant à l'administration de se préoccuper de la cause tibétaine. Ils ont désigné un coordinateur spécial pour le Tibet. Ils soulèvent la question tibétaine à chaque discussion sur les droits de l'homme ou l'environnement. Le gouvernement américain plaide en faveur de l'ouverture de négociations sans conditions entre la Chine et le Dalaï Lama, et cela depuis pas mal de temps; l'administration Clinton a agi dans ce sens à plusieurs reprises. Il y a également l'Union européenne; plusieurs pays ont adopté des résolutions parlementaires en faveur du Tibet : le Royaume Uni, la Norvège, l'Italie, l'Allemagne. Le Canada soulève toujours la question tibétaine lors de rencontres avec la Chine.
Mais aucune nation ne reconnaît officiellement le gouvernement en exil ? Non. La reconnaissance n'est pas une chose aisée. La plupart des nations dans le monde ont des relations diplomatiques avec la Chine et la première condition que celle-ci impose aux gouvernements est de déclarer que le Tibet est partie intégrante de la République Populaire.
La reconnaissance servirait-elle votre cause ? Pour le moment je ne pense pas que cela changerait grand chose. Cela mettrait un peu de pression sur la Chine, mais ce ne serait pas suffisant pour provoquer un changement. Je ne pense pas que la communauté internationale puisse faire autre chose que d'exercer une pression constante ou de persuader le peuple chinois de négocier avec Sa Sainteté pour trouver une solution authentique au problème. C'est la seule voie. Source : Lettre du Tibet n. 61, fév 02Ajouté le lundi 4 mars 2002 par Tibet info. Haut de la page
La reproduction des textes ci-contre est autorisée et encouragée sous la condition exprès de mentionner : « Source : 36 15 Tibet Info » + les autres sources mentionnées dans chaque article, ainsi que la date. Exemple "Source : 36 15 Tibet Info / AFP, 15 jan 98". Merci de respecter ces différents copyrights.
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