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Nouvelles du Tibet
Informations parues dans Tibet Info du 16 au 31 janv 1999
- Arrestations en Amdo
Cinq moines appartenant au monastère de Kirti, en Amdo, ont été arrêtés ainsi que deux laïcs, pour avoir résisté à la campagne "d'éducation patriotique" qui leur était imposée. Ils étaient accusés également d'avoir diffusé des livres et le texte de discours du Dalaï Lama et de s'opposer aux nouvelles exigences des "rééducateurs" interdisant la possession de photos du Dalaï Lama et de Kirti Rimpoché, qui vit en exil en Inde.
Le monastère de Kirti, situé dans la "Préfecture Autonome" de Ngaba, avait été investi en mai 1998 par une équipe de fonctionnaires cherchant à briser la loyauté des moines envers leurs chefs spirituels.
Six questions, dont les réponses étaient autant de dénonciations du Dalaï Lama, leur étaient posées.
Plusieurs moines, au lieu de répondre comme on leur avait dit de le faire, ont rédigé des lettres et des affiches affirmant "le Dalaï Lama est le chef religieux et politique des Tibétains, en accord avec le souhait démocratique de la population".
Ils prenaient également position en faveur du jeune Panchen Lama reconnu par le Dalaï Lama.
Leur opposition évidente aux séances de rééducation a forcé les autorités à interrompre le tournage d'un film de propagande.
Parmi les mesures prises par les autorités chinoises, il fut interdit aux moines et aux 600 élèves de l'école située dans le monastère d'étudier l'histoire du Tibet, et l'enseignement doit désormais se faire en chinois.
Si deux des moines arrêtés ont été relâchés après avoir été sévèrement battus au cours de leur détention, deux autres seraient gardés à la prison de Mianyang, à 100 km au nord-est de Chengdu.
L'un d'entre eux, Choephel, aurait déjà été condamné à trois ans. Le cinquième, Lobsang Sherab, 23 ans, considéré par les autorités comme étant le chef, appartient à une famille de résistants et serait accusé de menacer la sécurité de l'état. Il encourrait une peine longue. Le monastère de Kirti compte environ 2 000 moines, et est connu pour sa résistance à l'occupation chinoise.
Source : T.I.N., 18 janv. 98
N 990119
- Nouveau coordinateur pour le Tibet
Le département d'Etat américain a annoncé le 20 janvier la nomination de Mme Julia Vadala Taft au poste de coordinateur spécial pour le Tibet. Mme Taft cumulera cette tâche avec son poste actuel de Sec. d'Etat adjoint chargée de la population, des réfugiés et des mouvements migratoires.
"Un des principaux objectifs diplomatiques du bureau du coordinateur spécial est de promouvoir un dialogue substantiel entre le gouvernement chinois et le Dalai Lama ainsi que ses représentants", a indiqué le porte-parole du département d'Etat, James Rubin. Le coordinateur "s'efforce aussi d'aider à préserver l'héritage religieux, culturel et linguistique unique des Tibétains" et de défendre les droits de l'Homme, a-t-il ajouté. La création de ce poste de coordinateur spécial pour le Tibet est un rappel très fort aux dirigeants chinois de l'intention des Etats-Unis de garder le Tibet au sommet de ses préoccupations.
"Ce poste a permis de mieux faire connaître la situation du Tibet au sein de l'administration et permet de mener des discussions diplomatiques à un bien plus haut niveau au sujet du Tibet auprès de nombreux pays" indiquait John Ackerly, Président de International Campaign for Tibet. Source : AFP et I.C.T., 20 janv 98
N 990120
- L'Autriche pour Ngawang Choephel
Lors de sa visite à Vienne, en décembre 1998, Mme Sonam Deckyi, mère de Ngawang Choephel, a rencontré plusieurs députés autrichiens, dont Mme Madeleine Petrovic, chef des députés du parti des Verts. Cette dernière a écrit au vice-chancelier et ministre des Affaires étrangères d'Autriche, le Dr Wolfgang Schuessel, à propos de Mme Deckyi et de Ngawang Choephel. Voici la réponse du ministre.
[...] Comme vous le savez sans doute, le cas de Ngawang Choephel - la sentence aussi bien que les conditions de détention, et notamment le refus d'accorder un droit de visite à sa mère - a toujours été au centre de notre travail de défense des droits de l'homme, plus particulièrement l'an dernier dans le cadre du dialogue engagé entre l'Union européenne et la Chine sur ces droits. Lors des derniers pourparlers, qui se sont déroulés en octobre 1998 à Pékin, la troïka européenne a demandé aux autorités chinoises des précisions sur l'arrestation, les conditions de détention et la santé de Ngawang Choephel. Les Chinois n'ont fourni que des réponses très succinctes à ces questions. Le cas de Ngawang Choephel ne manquera donc pas d'occuper une place importante dans les pourparlers qui pourraient éventuellement se tenir à l'avenir entre l'Union européenne et la Chine. La suite qui lui sera donnée permettra d'apprécier si le gouvernement chinois entend véritablement améliorer les droits de l'homme dans ce pays.
Le cas de Ngawang Choephel a également fait l'objet de plusieurs rencontres avec des groupes de Tibétains en exil au ministère des Affaires étrangères. La mère de Ngawang, Mme Sonam Deckyi, et sa compagne ont du reste été reçues au ministère le 11 décembre 1998 pour un entretien long et approfondi. Mme Deckyi a alors reçu l'assurance que l'Autriche continuera d'agir pour faire libérer son fils dans le cadre de l'Union européenne. Les représentants autrichiens sur place ont donc eu pour instructions de suivre de très près l'évolution de ce dossier.
Dans le but de rappeler une nouvelle fois aux autorités chinoises l'importance de ce dossier et le sérieux de notre action, j'ai exprimé très clairement à l'ambassadeur de Chine à Vienne, lors d'un entretien que j'ai eu personnellement avec lui le 22 décembre 1998, les inquiétudes que suscite ce cas en Autriche. J'ai aussi écrit au vice-premier ministre chinois, Qian Qichen, lui demandant notamment de permettre à Mme Deckyi de rendre visite à son fils.
Soyez assurée que je continuerai de m'occuper personnellement de ce dossier. Veuillez agréer l'expression de mes sentiments les meilleurs.
Wolfgang Schuessel.
Source : Austrian Committee for Tibet -
Traduction de l'anglais : Tibet Info et Canada Tibet Committee MC F. N 990221
- Appui de la Chine à Shugden
Le Premier Secrétaire de l'ambassade de Chine à New Delhi M. Tau Wenching et sa femme ont visité le camp de réfugiés tibétains de Mundgod le 14 déc. 1998 en compagnie de Thupten Palsang, connu aussi sous le nom de Nagpo Chenpo, un membre actif de Shugden autrefois moine du monastère de Sera Mey (à Bylakuppe dans le sud de l'Inde).
Cette visite confirme le lien évident entre les partisans de Shugden et les autorités chinoises depuis la controverse qui a débuté en 1996, ce groupe dénonçant régulièrement le Dalaï Lama et le gouvernement en exil. Ils prétendent que le chef spirituel tibétain cherche à les empêcher de pratiquer leur religion.
Celui-ci au contraire s'est contenté de dire qu'il ne souhaitait pas voir les pratiquants du rituel de Shugden assister à ses enseignements. Il estime en effet que ce culte s'oppose à son chemin d'ouverture et de tolérance. Un dossier sur cette controverse extrait de la revue Actualité Religieuse de juin 1998 est disponible sur le site web de Tibet Info à l'adresse http://eurasie.comfm.fr/Tibet/soucis_dl.html
N 990222
- Campagne anti-religion
Une nouvelle campagne destinée à éradiquer la religion bouddhiste et à propager l'athéisme vient d'être lancée au Tibet, le jour même où les autorités de Pékin réaffirmaient leur politique de protection des croyances religieuses.
Décidée lors de la réunion à Lhassa d'une commission de propagande le 8 janvier 99, elle doit durer trois ans et vise particulièrement les paysans et les nomades, et non plus seulement les cadres ou les membres du Parti. Télévision et médias sont largement mobilisés dans cette campagne, le but étant de faire passer le message que non seulement l'athéisme est nécessaire, mais que l'athéisme marxiste doit être promu énergiquement.
240 cadres réunis en 57 équipes de travail seront envoyés sur le terrain dans le but de "renforcer la lutte contre les séparatistes et résister aux infiltrations de la clique réactionnaire du Dalaï Lama" a annoncé la TV de Lhassa.
Plus de 36 000 moines ont déjà été soumis aux "équipes de rééducation patriotique". Plusieurs milliers d'entre eux, qui refusaient de dénoncer le Dalaï Lama, ont été chassés de leur monastère, arrêtés ou battus.
Cette nouvelle campagne et les mesures de coercition qui l'accompagnent entrent officiellement en vigueur à peine 4 mois après la signature par la Chine du Pacte des Nations-Unies sur les Droits Civils et Politiques (le 5 oct 1998) qui stipule très précisément le droit à la liberté de pratiquer la religion de son choix.
Source : Tibet Information Network, 22 janv. 99 Tibet Info publiera prochainement dans la rubrique "Dossiers" un document exceptionnel sur les questions et les réponses imposées aux moines et nonnes des monastères tibétains.
N 990124
- Destruction de monastères
Des moines récemment arrivés en exil en Inde ont apporté des informations dramatiques sur la fermeture et la destruction totale ou partielle de deux des plus anciens sites religieux du Tibet, le monastère de Jonang (XIIIème siècle) et le couvent de Rakhor (XIIème siècle) au nord-ouest de Lhassa.
Jonang
Siège de l'école Jonang - une branche de l'école Kagyu dont l'un des plus illustres maîtres fut Tanamatha, spécialiste de Kalachakra, et qui fut rattachée à l'école Gelugpa par le Vème Dalaï Lama au 17ème siècle - le "Jonang Kumbum" avait été en grande partie détruit à la fin des années 1950, avant la Révolution Culturelle.
Quelques peintures murales de grande qualité demeuraient néanmoins lorsque le monastère fut reconstruit dans les années '80, sous l'impulsion de son abbé, le Vénérable Kunga Yeshi.
Investi par deux "équipes de rééducation" en juillet 1997, le monastère a été fermé et les moines, qui refusaient tous de signer une dénonciation du Dalaï Lama, renvoyés chez eux.
Statues et poutres ont été pillées par la police chinoise et certains objets du culte ont été vus chez des antiquaires du marché de Lhassa. Le Vénérable Kunga Yeshi et plusieurs moines ont été arrêtés et gardés en prison plusieurs mois. Certains ont pris la route de l'exil.
Rakhor
Le couvent des moniales de Rakhor, dans le comté de Toelung Dechen, appartenait lui à l'école Nyingmapa. Le 20 novembre 1997, occupé par plus de cent soldats en armes venus à bord de vingt camions, le monastère fut fermé et 79 des 82 moniales renvoyées chez elles. En janvier 1998 aucune nonne ne demeurait plus sur place, et en août le couvent fut entièrement détruit, à l'exception d'une salle capitulaire.
Fondé au XIIème siècle, le couvent était l'un des plus anciens du Tibet. Il avait été détruit une première fois pendant la Révolution Culturelle (1966-1976) et reconstruit en 1986.
Le 8 août 1997, moins d'un mois après la fermeture de Jonang, l'agence Xinhua ("Chine Nouvelle") écrivait :"la religion connaît un âge d'or au Tibet".
Selon des moines récemment arrivés en exil "la période de relative liberté qui avait apporté une bouffée d'espoir et de survie a été réduite à néant en avril 1997 avec la prétendue campagne d'éducation patriotique". Ils comparent la situation actuelle à celle qui prévalait au temps de la Révolution Culturelle.
Source : T.I.N., 27 janv 98, Informations complémentaires : CSPT. N 990128
- Mécontentement en Chine
La Chine se trouve confrontée à une montée des mécontentements dont l'ampleur exacte reste difficile à évaluer.
Une bombe artisanale a explosé sur un marché de Yizhang, dans la province centrale du Hunan, le 25 janvier, faisant 9 morts et 66 blessés. Cette explosion fait suite à une longue série d'incidents violents à travers la Chine dont au moins six ont été enregistrés depuis début janvier 99, parmi lesquels plusieurs attentats meurtriers ainsi que des affrontements sanglants entre policiers et villageois protestant contre la corruption et les impôts trop élevés.
La province centrale du Hunan a connu ces dernières semaines une série de violences, parmi lesquelles des affrontements violents entre 5 000 villageois et un millier de policiers, le 8 janvier dernier, dans le canton de Ningxiang, qui avaient fait un mort et plus de 100 blessés.
Une bombe avait également explosé le 17 janvier dernier dans un autocar à Changsha, la capitale provinciale, faisant 37 blessés dont l'un avait perdu les deux jambes. L'auteur de l'attentat n'a pas été retrouvé.
Plusieurs manifestations d'ouvriers licenciés se sont par ailleurs produites dernièrement dans le Hunan dont l'une s'était traduite par le blocage d'un pont dans la ville de Changde, près de Changsha, pendant plusieurs heures le 18 janvier dernier.
"Les autorités pratiquent la politique de l'autruche (...) C'est comme une boule de neige qui devient de plus en plus grosse, les gens sont désespérés et réagissent avec des actions violentes" commente pour sa part le dissident chinois en exil Liu Qing, de l'organisation Human Rights in China.
Mais si peu d'analystes prédisent un embrasement généralisé à court terme, la plupart reconnaissent une nervosité grandissante des autorités chinoises face à la multiplication des incidents ces dernières semaines, alors que la Chine se prépare à célébrer le 50ème anniversaire de la fondation du régime communiste le 1er octobre prochain.
La Chine s'apprête également à marquer en juin prochain le 10ème anniversaire de la répression sanglante de la place Tiananmen, qui donne d'ores et déjà des sueurs froides aux autorités de Pékin. Sources : AFP (divers)
N 990131
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