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Message de Sa Sainteté le Dalaï Lama à l’occasion du 46ème anniversaire du Soulèvement national du peuple tibétain de 1959
jeudi 10 mars 2005 par Bureau du Tibet, Paris
"A l’occasion du 46è anniversaire du soulèvement du peuple tibétain, j’adresse mes vœux les plus chaleureux à mes compatriotes tibétains, à ceux qui vivent en exil et à ceux qui sont au Tibet. Je salue également très chaleureusement tous nos amis de par le monde.
Durant ces quatre dernières décennies, de grands changements se sont produits au Tibet. Des progrès économiques ont été constatés, notamment en matière de développement des infrastructures. Le train Golmud-Lhassa actuellement en construction en est un exemple parmi d’autres. Par ailleurs, durant la même période, beaucoup de journalistes et de voyageurs indépendants qui se sont rendus au Tibet ont écrit sur ce qui s’y passait réellement, et non pas sur ce qu’on choisissait de leur montrer. La plupart décrivent une situation très différente de celle dont fait état le gouvernement chinois, et se montrent très critiques envers la Chine pour son non-respect des droits de l’Homme, de la liberté religieuse et de l’autonomie du Tibet. En vérité, ce qui est arrivé et continue de se produire, c’est que depuis la création de la Région automne du Tibet, le pouvoir n’est exercé de fait que par les seules autorités chinoises. Le peuple tibétain a été et est toujours en butte à la présomption de culpabilité et à une répression croissante. Le manque d’égalité et d’une véritable harmonie ethnique fondée sur la confiance, ainsi que l’absence d’authentique stabilité au Tibet montrent clairement que les choses ne vont pas bien et qu’il y a un problème de fond.
De temps en temps au Tibet, d’importants dirigeants tibétains, hommes respectés de tous, s’expriment franchement sur ce sujet, allant jusqu’à payer chèrement leurs actions courageuses. Au début des années 1960, feu le Panchen Lama, dans une pétition adressée aux autorités chinoises, a fait connaître les souffrances et les attentes du peuple tibétain. De même, dans la biographie qu’il a publiée récemment en anglais, Bapa Phuntsok Wangyal, l’un des principaux dirigeants communistes tibétains, insiste particulièrement sur la nécessité de mieux faire connaître les intérêts du peuple tibétain. De fait, il est manifeste qu’au Tibet la plupart des hauts responsables tibétains sont, au plus profond d’eux-mêmes, extrêmement mécontents.
Cette année, le gouvernement chinois célébrera le 40è anniversaire de la création de la Région autonome du Tibet. Beaucoup de festivités et de manifestations commémoratives auront lieu pour célébrer l’événement, mais elles n’auront guère de sens car elles ne reflèteront pas les réalités profondes. On veut rappeler, par exemple, que le Grand bond en avant et la Révolution culturelle ont été fêtés en grande pompe et comme de réels exploits, au moment où ils ont eu lieu.
La Chine a réalisé de formidables progrès économiques depuis plus de deux décennies. La Chine d’aujourd’hui n’est plus ce qu’elle était il y a vingt ou trente ans. Beaucoup de choses ont changé avec pour résultat que ce pays est devenu aujourd’hui un acteur majeur sur la scène internationale, position méritée, sans aucun doute, car il s’agit d’une grande nation, dotée d’une population considérable et d’une civilisation riche et ancienne. Cependant son image est ternie du fait de ses violations des droits de l’Homme, de ses actions antidémocratiques, de ses manquements à l’état de droit et de l’inégalité dans l’application des droits à l’autonomie chez les minorités, y compris les Tibétains. Pour le monde extérieur, c’est une raison de plus pour se montrer vigilant et attentif à son égard. Au plan international, ces défaillances sont un obstacle à l’unité et à la stabilité de la nation, ce qui est de la plus extrême importance pour les dirigeants de la République populaire de Chine. Selon moi, il est important que la Chine, en même temps qu’elle devient une nation puissante et respectable, soit capable d’adopter une politique raisonnable, fondée sur la confiance réciproque.
Le monde dans sa globalité, et la Chine qui en fait partie, sont en train de changer pour un avenir meilleur. Ainsi, on a pu constater récemment qu’on accordait une plus grande attention et un plus grand intérêt à la paix, à la non-violence, à la démocratie, à la justice et à la protection de l’environnement. Dernièrement, la réponse des gouvernements et des personnalités à travers le monde en faveur d’une aide sans précédent aux victimes du désastre du tsunami, a été l’occasion de réaffirmer l’existence de véritables relations d’interdépendance dans le monde et de conforter l’idée de la nécessité d’une responsabilité universelle.
Si je m’implique personnellement dans les affaires du Tibet, ce n’est pas pour revendiquer certains droits personnels ou une quelconque position politique me concernant, ni pour tenter de faire valoir des revendications pour l’administration tibétaine en exil. En 1992, dans une déclaration officielle, j’ai déclaré que lorsque nous retournerons au Tibet, une fois acquise l’assurance d’un certain degré de liberté, je ne conserverai aucune fonction au sein du gouvernement tibétain et n’accepterai pas de responsabilité politique. J’ai déclaré également que l’actuelle administration en exil serait dissoute. En outre, les Tibétains qui vivent actuellement au Tibet assumeront seuls la pleine responsabilité d’administrer le Tibet.
Une fois encore, je veux réaffirmer devant les autorités chinoises qu’aussi longtemps que je serai responsable des affaires du Tibet, nous continuerons à nous sentir pleinement engagés par l’Approche de la voie médiane que j’ai proposée, approche qui ne revendique pas l’indépendance pour le Tibet mais confirme notre volonté de demeurer au sein de la République populaire de Chine. Je suis convaincu qu’à la longue une telle approche sera profitable au peuple tibétain en lui permettant d’avancer sur la voie du progrès matériel. Il est encourageant de constater le soutien qu’a rencontré cette approche dans différentes parties du monde du fait qu’elle est justifiée, réaliste et qu’elle représente un avantage à la fois pour les Chinois et pour les Tibétains. Ce qui m’encourage particulièrement, c’est la reconnaissance et le soutien que m’ont manifesté certains groupes d’intellectuels en Chine.
Je suis heureux d’avoir renoué des contacts avec les dirigeants chinois et de voir s’améliorer peu à peu nos échanges, comme l’a montré la troisième série de rencontres en septembre dernier. Maintenant que la direction politique de notre gouvernement élu au suffrage universel a pris plus de responsabilités dans les affaires tibétaines, je lui ai recommandé d’enquêter sur le sujet soulevé par nos partenaires chinois durant notre troisième série de dialogues et de prendre des mesures nécessaires pour répondre à ces besoins. Nous gardons espoir qu’éventuellement nous serons capables de développer la confiance nécessaire pour résoudre à notre mutuel avantage cette question du Tibet qui est latente depuis longtemps. Pour finir, j’aimerai saisir l’occasion qui m’est fournie aujourd’hui d’exprimer la gratitude et la reconnaissance du peuple tibétain au gouvernement indien et son peuple pour la sympathie et le soutien inébranlable qu’ils nous ont manifesté. Personnellement, je me considère comme faisant partie de cette nation, non seulement en raison des liens religieux et culturels qui ont rapproché l’Inde et le Tibet durant des siècles mais aussi pour avoir, comme la plupart des Tibétains en exil, vécu en Inde durant ces quarante cinq dernières années.
Mes prières vont aux hommes et aux femmes courageux du Tibet, qui ont donné leur vie pour la défense de la liberté du Tibet".
- Sa Sainteté Le Dalaï Lama
Version en langue française diffusée par le Bureau du Tibet, 84 bd Adolphe Pinard, 75014 PARIS
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