Le monde peut-il aider le Tibet ?
mercredi 15 août 2012 par Rédaction , Monique Dorizon
La communauté internationale doit faire davantage pour aider les Tibétains qui protestent depuis des décennies de répression sous le régime chinois, selon des analystes et des groupes défenseurs des droits humains, appelant à faire pression sur Pékin à l’ONU et à dialoguer avec des groupes tibétains.
Avec ces Tibétains qui se sont auto-immolés pour s’opposer à la domination chinoise [1], la question tibétaine a été mise en évidence à travers le monde, mais la réponse internationale aux manifestations a été mise en sourdine, disent les analystes et les groupes de défense des droits.
"Il y a autant de pression que ce que les gouvernements sont prêts à mettre", a déclaré Sophie Richardson, Directrice au bureau de Washington de Human Rights Watch
pour la Chine à Radio Free Asia dans une interview.
"Au Conseil des Droits de l’Homme à Genève, les gouvernements peuvent parrainer une résolution commune, ou même organiser un événement parallèle, afin d’exprimer leurs préoccupations au sujet du Tibet", poursuit Sophie Richardson.
"Nous savons que le gouvernement chinois n’aime pas être critiqué publiquement, mais les interpeller sur ce genre de comportement ne nuit pas, en particulier à un moment où un nombre considérable de personnes à l’intérieur de la Chine sont consommateurs de ce type d’informations".
Sophie Richardson a noté que dans les dialogues sur les Droits de l’Homme et lors d’autres réunions diplomatiques avec la Chine, les États-Unis et l’Union Européenne expriment fréquemment des préoccupations sur le Tibet, mais elles sont repoussées.
"Si le gouvernement de la Chine est toujours un participant de mauvaise foi dans ces négociations, ayons un dialogue avec des militants et des écrivains tibétains qui veulent parler de ces sujets", suggère Sophie Richardson.
Les appels internationaux en direction de la Chine afin d’aborder les inquiétudes au sujet du Tibet sont systématiquement écartés par les diplomates chinois, qui affirment le droit de la Chine à régner sur la région himalayenne qu’elle a envahie il y a plus de 50 ans. [2]
Presque toutes les personnes qui se sont immolées ont demandé le retour au Tibet du chef spirituel, le Dalaï Lama, et la liberté pour le peuple tibétain, tout comme elles ont critiqué ce qu’elles appellent les injustices politiques, culturelles, religieuses et sociales.
De plus en plus, des Tibétains ordinaires rejoignent les moines et les nonnes bouddhistes dans les immolations. Au moins deux d’entre eux, des jeunes femmes, étaient mères de jeunes enfants : Rikyo et Dolkar Tso. [3]
En réponse, les forces de sécurité chinoises de la région ont réprimé, arrêtant des dizaines de Tibétains, dont des éducateurs, des écrivains, et des personnalités culturelles, accusant les "forces extérieures" d’organiser les manifestations.
Dans un article du Washington Post, le 13 juillet 2012, le Premier ministre tibétain en exil, Lobsang Sangay, a lancé un appel d’aide urgente au monde.
"Parce que nous savons que les démocraties mondiales reconnaissent les droits fondamentaux de l’homme et les libertés comme des valeurs universelles, nous demandons à la communauté internationale d’intervenir avant que notre situation ne se détériore davantage", a écrit Lobsang Sangay.
S’adressant à Radio Free Asia, une ancienne fonctionnaire du Département d’État et expert sur les affaires tibétaines dit : "Devraient être coordonnées par les gouvernements concernés des démarches demandant l’accès aux zones tibétaines de leurs propres diplomates, de la Croix-Rouge internationale et l’ONU à des fins d’établissement des faits".
"Il y a un réel problème de manque d’information et de connaissance du contexte de ce qui se passe. Les médias n’ont pas été beaucoup en mesure d’y accéder non plus, ce qui a limité la couverture de la situation".
"Les États-Unis devraient également envisager d’utiliser certains de leurs mécanismes pour bloquer les auteurs de violations des droits sur les visas et autres problèmes, et d’appliquer ces dispositions aux fonctionnaires qui sont à l’origine et à la mise en œuvre de ces politiques profondément viciées (au Tibet)", a-t-elle dit.
Prenant également la parole sur Radio Free Asia, Tenzin Dorjee, Président de "Students for a Free Tibet" installé à New-York, a appelé à un renforcement de "l’approche multilatérale pour faire pression sur la Chine afin qu’elle inverse sa politique répressive au Tibet".
"Nous avons besoin d’une coalition du type des « Amis de la Syrie », un groupe « Amis du Tibet » pour montrer la priorité du Tibet comme question humanitaire de préoccupation mondiale", a déclaré Tenzin Dorjee.
Dans le même temps, Tenzin Dorjee a ajouté : "Nous ne mettons pas tous nos œufs dans le panier de l’intervention politique ou diplomatique".
"Dans un mouvement d’auto-suffisance du Tibet appelé Lhakar [4], ou « mercredi blanc », un nombre croissant de Tibétains font des efforts pour porter les vêtements traditionnels, parler tibétain sans mélange avec le chinois, ne manger que dans les restaurants tibétains, et acheter uniquement à des entreprises tibétaines", ajoute Tenzin Dorjee.
"Nous mettons en valeur l’importance de la tactique de non-coopération dans le cadre de la stratégie à long terme visant à rendre l’occupation chinoise de la Chine trop coûteuse à entretenir", a déclaré Tenzin Dorjee.
Dans le même temps, cependant, le peuple tibétain, lui-même, a parfois été "inefficace" pour présenter sa situation au monde, a déclaré Jamyang Norbu, blogueur du Tennessee et auteur de livres sur le Tibet.
"Le peuple tibétain a une revendication historique de l’indépendance et veut être libre", dit Jamyang Norbu.
"Mais les campagnes de soutien lancées en dehors du Tibet ont mis l’accent sur toute une gamme confuse de questions étroites, par exemple, la protection des libertés religieuses ou à la protection de l’environnement".
Aux Tibétains, en tant que peuple, de décider "ce que nous voulons vraiment" dit Jamyang Norbu.
"Nous devons nous prendre en main avant de demander quoi que ce soit au monde", poursuit-il.
Dans une lettre envoyée le 9 août 2012 à la Secrétaire d’État américaine Hillary Clinton, deux parlementaires américains ont appelé à "des démarches diplomatiques internationales plus fortes, mieux coordonnées, plus visibles", en réponse aux politiques de la Chine envers les Tibétains.
"Nous sommes très conscients que les responsables américains discutent régulièrement du Tibet et de nombreux autres problèmes de droits avec les gouvernements aux vues similaires", ont écrit James McGovern [5] (D-MA [6]) et Frank Wolf (R-VA [7]) [8], membres du Congrès.
"Toutefois, une diplomatie plus visible, publique et coordonnée est nécessaire pour que le gouvernement chinois sente la pression afin de modifier son comportement".
Les États-Unis pourraient jouer un rôle de leadership dans l’organisation d’une conférence internationale sur le Tibet, ont suggéré McGovern et Wolf, "ou envisager des réunions publiques périodiques avec un groupe d’autres gouvernements, comme moyen efficace d’exprimer les inquiétudes".
Source : Radio Free Asia, 10 août 2012.
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[1] Voir l’article et la carte récapitulative des immolations
[2] Voir la Chronologie historique détaillée du Tibet.
[3] Voir les articles :
"Rikyo, mère de trois enfants, s‘immole par le feu à Dzamthang", du 02/06/2012
"[Dolkar Tso et Lobsang Tsultrim s’immolent par le feu les 6 et 7 août 2012]", du 11/08/2012.
[4] Voir l’article "LHAKAR - La révolution non-violente est en marche"
[5] Voir la lettre de James McGovern à Hillary Clinton
[6] D-Ma : élu Démocrate, État du Massachusetts
[7] R-VA : élu Républicain, État de Virginie
[8] Frank Wolff est le premier membre de la Chambre des Représentants à visiter le Tibet depuis 1959
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