La Cour nationale espagnole a émis un mandat d’arrêt à l’encontre de dirigeants chinois pour leurs politiques au Tibet
dimanche 24 novembre 2013 par Rédaction , Monique Dorizon
Le système juridique espagnol reconnaît le principe de "compétence universelle", une partie du droit international qui permet aux tribunaux d’aller au-delà des frontières nationales en cas de génocide, de torture, de terreur, de crimes de guerres et d’autres crimes internationaux graves perpétrés par des individus, des gouvernements ou des autorités militaires et de juger ces cas en dehors de leur pays d’origine.
Cependant, la loi espagnole exige que tous les cas considérés impliquent directement l’Espagne, un citoyen ou un résident de l’Espagne. Un des plaignants dans l’affaire, Thubten Wangchen, d’origine tibétaine, est ressortissant espagnol.
En octobre 2013, la Cour nationale d’Espagne a accepté d’entendre les accusations de génocide au Tibet contre l’ancien Président chinois Hu Jintao. Elle fut réprimandée par Pékin qui a qualifié cette décision "d’attaque" contre le gouvernement chinois. [1]
Le tribunal a donné des ordres pour informer Hu Jintao de cet acte d’accusation et l’interroger sur sa politique au Tibet par l’intermédiaire de l’ambassade de Chine à Madrid.
La décision du 19 novembre 2013 d’émettre des mandats d’arrêt a été prise par la Cour d’appel (Article 4 de la Cour pénale de la Cour nationale espagnole, Audiencia Nacional), juridiction nationale d’enquête pour les crimes graves tels que terrorisme, trafic de drogue, piraterie ou blanchiment d’argent.
Les dirigeants chinois poursuivis sont :
Jiang Zemin, ancien Président ;
Li Peng, Secrétaire du Parti, et Premier ministre lors de la répression au Tibet dans les années 1980 et au début des années 1990 (et la répression sur la place Tiananmen en juin 1989) ;
Qiao Shi, ancien Chef de la sécurité chinoise et responsable de la Police populaire armée (PAP) pendant la période de la loi martiale au Tibet à la fin des années 1980 ;
Chen Kuiyuan, Secrétaire du Parti de la "Région Autonome du Tibet" de 1992 à 2001 (connu pour sa position en faveur de la ligne dure contre la religion et la culture tibétaines) ;
Deng Delyun (également connu sous le nom Peng Pelyun), ministre de la planification familiale dans les années 1990.
En annonçant sa décision mardi 19 novembre 2013, le tribunal espagnol a souligné "les éléments de participation" de Jiang Zemin et des quatre autres anciens chefs au génocide et crimes contre l’humanité pratiqués dans les régions tibétaines de la Chine en raison de leur "responsabilité politique ou militaire" au moment où les faits ont été commis.
Dans la poursuite de son enquête, le tribunal a tenu compte des témoignages d’anciens prisonniers politiques tibétains et des experts internationaux, et a passé en revue une vaste documentation des violations, y compris la torture et les exécutions extrajudiciaires, commises par les forces de sécurité chinoises au Tibet.
Les experts juridiques en Espagne estiment que cette décision est potentiellement aussi importante que l’arrestation de Pinochet à Londres en 1998 après qu’un groupe d’avocats espagnols ait mis en place un procès contre le dictateur chilien, qui a dirigé par la terreur pendant 17 ans et ordonné des assassinats.
Les analystes disent également que la décision pourrait dissuader les dirigeants chinois de voyager à l’extérieur de la République Populaire de Chine car ils pourraient être arrêtés pour interrogatoire sur les crimes qui leur sont reprochés. Tous les dirigeants sont confrontés à la possibilité de voir leurs comptes bancaires à l’étranger gelés.
"Nous tenons à dédier ce succès judiciaire non seulement aux victimes, mais aussi aux milliers de « combattants de la liberté » et à la mémoire de tous ceux qui se sont immolés dans et en dehors du Tibet, ceux qui risquent leur vie et leur liberté face à la passivité de la communauté internationale dont le silence est complice de génocide. Leur sens de la justice et leur détermination pour la vérité sont inscrits dans cette bataille judiciaire qui croit en des valeurs non violentes", a déclaré Alan Cantos, Président du Comité de Soutien au Tibet en l’Espagne, le mois dernier lorsque le tribunal a décidé d’inculper Hu Jintao.
S’adressant à l’agence Associated Press, Alan Cantos a salué la récente décision de la Cour, mais il a déclaré que les mandats d’arrêt ne pouvaient être rapidement exécutés.
"Ce n’est pas facile, mais c’est un grand pas", a-t-il déclaré, lui qui a porté l’affaire devant la Cour nationale.
Les anciens dirigeants chinois cités dans les mandats sont "coincés dans leur propre pays, et un tribunal compétent, est en train de pointer un doigt sur eux", a déclaré Alan Cantos.
Sources : Phayul, 19 novembre 2013, Radio Free Asia, 19 novembre 2013..
Voir également l’article précédent : "La justice espagnole se déclare compétente pour juger l’ancien Président chinois Hu Jintao pour génocide", du 24/11/2013.
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[1] La Chine rejette systématiquement toute critique extérieure de ses politiques menées au Tibet, les considérant comme une ingérence dans ses affaires intérieures, affirmant que les plaintes sont orchestrées par un groupe ou une "clique", dirigés par le chef spirituel tibétain en exil, le Dalaï Lama.
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