Dargye et Tobgye Tseten : deux nouvelles immolations, pour la 1ère fois à Lhassa

lundi 28 mai 2012 par Rédaction

Un Tibétain est mort et un autre s’est grièvement blessé en tentant de s’immoler par le feu dimanche 27 mai 2012 à Lhassa, la capitale du Tibet qui jusque-là n’avait pas enregistré de tels actes désespérés, accomplis en réaction à la tutelle implacable de la Chine. 36 Tibétains, en majorité des moines bouddhistes, se sont immolés par le feu ou ont tenté de le faire depuis début mars 2011 dans les régions tibétaines. [1]
Tous les deux se sont transformés en torche humaine au cœur de la ville historique de Lhassa, chef-lieu de la "Région Autonome du Tibet".
La ville, toujours fermée à la presse étrangère et ouverte aux touristes s’ils sont détenteurs d’un laissez-passer, est placée sous haute sécurité depuis les violences qui s’y sont produites en 2008. [2]
Les policiers sont parvenus à éteindre les flammes "en quelques minutes", a rapporté le 28 mai Chine nouvelle. L’un des deux Tibétains, nommé Dargye, a survécu à ses blessures, selon l’agence officielle.

Dargye est originaire de Ngaba [3], dans l’ancienne province tibétaine du Kham, actuelle province du Sichuan, où ont eu lieu plusieurs immolations de Tibétains depuis l’année dernière, tandis que l’autre, Tobgye Tseten [4], venait de l’ancienne province tibétaine de l’Amdo, actuelle province du Gansu, a ajouté Chine nouvelle.

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Barkhor. Place du Jokhang, 2006.
Photo © Mireille Brousset.

L’acte désespéré des deux Tibétains, des jeunes moines selon Radio Free Asia (RFA), s’est déroulé devant le Temple du Jokhang, un haut-lieu de pèlerinage séculaire.
"Lhassa est désormais quadrillée par la police et les forces para-militaires et la situation est très tendue", a décrit à RFA un Tibétain en exil ayant des correspondants sur place.
Les autorités locales, contactées par l’AFP, se sont refusées à tout commentaire. Une femme jointe par téléphone dans un hôtel de Lhassa n’a également pas souhaité s’exprimer. "Quelque chose s’est effectivement passé ici, mais je ne peux pas en dire davantage", a-t-elle dit.
Une autre gérante d’hôtel a expliqué à l’AFP que les communications par téléphones portables étaient brouillées dans le quartier du monastère bouddhiste du Jokhang, cœur spirituel de Lhassa.
"Il y a beaucoup plus de policiers qu’avant et ils renforcent les contrôles d’identité", a-t-elle décrit.

Les recherches sur l’internet contenant le mot "Dazhaosi", le nom chinois du temple, étaient par ailleurs bloquées le 28 mai par le système de censure exercée par les autorités chinoises.
Un haut responsable communiste de la région, Hao Peng, a condamné les immolations, en estimant qu’elles constituaient "des actes destinés à séparer le Tibet de la Chine".

Interrogé le 28 mai, un porte-parole de la diplomatie chinoise a lui assuré "ne pas être au courant" de ces récentes immolations. "La situation au Tibet est stable", a déclaré Liu Weimin. "Certaines personnes, en particulier à l’étranger, tentent de saboter cette stabilité."
L’association de défense des Tibétains Free Tibet a au contraire estimé le 28 mai que "le printemps tibétain (avait) désormais gagné le cœur de la capitale du Tibet".

Qi Zhala, le plus haut responsable du Parti communiste chinois de Lhassa [5], avait ordonné au début de l’année un renforcement de la surveillance policière des monastères au Tibet, ainsi qu’une répression accrue contre les activités "séparatistes" selon lui fomentées par la "clique" du Dalaï Lama, le chef spirituel des Tibétains, honni par Pékin.
De nombreux Tibétains ne supportent plus ce qu’ils considèrent comme une domination grandissante des Hans, l’ethnie fortement majoritaire en Chine, et la répression de leur religion et de leur culture.

Source : AFP, Radio Free Asia, 28 mai 2012.

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[1] Voir l’article et la carte récapitulative des immolations

[2] Lhassa avait été le théâtre en 2008 de violences meurtrières anti-chinoises. Ces manifestations avaient débuté le 10 mars, jour anniversaire du soulèvement contre la tutelle de Pékin en mars 1959, avant de s’étendre à d’autres régions de Chine où vivent des minorités tibétaines.
Voir l’article "Escalade de la violence au Tibet - Historique", du 14/03/2008.

[3] Localisation de Ngaba ("Aba" ou 阿坝藏族羌族自治州 en chinois) au centre de cette carte.

[4] Selon les sources, Tobgye Tseten est également orthographié Dorjee Tseten

[5] L’AFP indique Qi Zhala comme étant le plus haut responsable du P.C.C. au Tibet. Pourtant, le site officiel china.org.cn indiquait le 25 août 2011 que Chen Quanguo était nommé Secrétaire du PCC pour la "Région Autonome du Tibet", en remplacement de Zhang Qingli. Chen Quanguo aurait-il été remplacé ?


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